Mes notes sur une conférence sur l’opinion publique russe sommeillaient depuis plusieurs semaines, c’est le temps de les ressortir! Cette conférence date de la fin du mois d’avril, donc ça peut avoir un peu changé entretemps. Pour moi, c’est toujours d’actualité, parce que même si on entend moins parler de la guerre, alors que ça a fait quatre mois que ça dure la semaine derrière, c’est encore en cours.
J’avais déjà parlé un peu de ce qui se passait du côté de la Russie ici avec des témoignages plus personnels. Là, ce que j’écris vient de recherches et sondages menés par des chercheurs spécialisés dans l’histoire et la politique russe. Je vous mets d’ailleurs le lien vers le blog d’un de ces chercheurs. Le titre de la conférence, organisée par le Centre for European, Russian, and Eurasian Studies (CERES) rattaché à l’University of Toronto’s Munk School of Global Affairs & Public Policy, était « Est-ce que les Russes soutiennent la guerre? ». Et la réponse, en gros, est « c’est dur à dire ». Parce qu’il y a tellement une grosse manipulation de l’information, et une difficulté à faire passer l’information vers et hors de la Russie (ils sont principalement coupés des réseaux sociaux du reste du monde) qu’ils ne savent pas nécessairement ce qui se passe. Et en ce moment particulièrement, pour les chercheurs occidentaux, c’est dur d’entrer en contact avec des Russes pour en discuter et entendre leur opinion.
Ce qui ressort des sondages est que, de façon générale, les Russes ne veulent pas de guerre. Logique. Ça a beaucoup de répercussions négatives. Un des sondages demandait comment la Russie devrait agir face au conflit en Ukraine. 36% ont répondu qu’elle devrait fournir de l’aide humanitaire. 51% ont répondu qu’il fallait envoyer des soldats et/ou des armes et/ou du support moral pour aider les Ukrainiens… à se défendre contre les autorités de Kiev. Ce point est très intéressant et particulier, et montre une facette de ce qui se passe avec la manipulation de l’information. Ce qui se dit aux nouvelles russes, et comme on a vu avec la narration du sauveur que Putin tient à adopter, c’est que la Russie a le bon rôle et vient en fait en aide à l’Ukraine, plus précisément aux Ukrainiens qui seraient en fait des Russes, et qui doivent se défendre contre les Nazis (vraisemblablement, les autorités de Kiev), qui, toujours selon Putin, sont une menace pour l’Ukraine et les Russes qui y habitent.
Alors c’est vrai qu’il y a eu une collaboration entre l’Ukraine et les Nazis pendant la Deuxième Guerre Mondiale. Mais il y en a aussi eu une avec la Norvège ou avec l’Autriche, et on ne dit pas de ces pays qu’ils sont nazis aujourd’hui. Déjà, c’est un argument un peu aberrant. Mais c’est ce qui semble être mis de l’avant en Russie: il y a une montée du nazisme en Ukraine, on doit aller défendre nos compatriotes qui y sont. Donc dit comme ça, c’est bien présenté, et ça donne le goût et même le devoir moral de l’encourager. Argument qui peut facilement être démonté: Zelensky, élu à la tête de l’Ukraine, est Juif.
Pour en revenir au sondage, finalement, 38% n’ont pas voulu/osé répondre, ou disaient qu’ils ne devraient pas s’en mêler. C’est quand même une grosse proportion, qui illustre que c’est compliqué en ce moment d’avoir des résultats pertinents, et qu’il y a un climat de censure qui n’aide pas la circulation de l’information.
En gros, les Russes ne soutiennent pas nécessairement la guerre, mais n’ont pas facilement accès à toutes les informations nécessaires pour donner des vraies réponses, ou sont censurés.
Rendez-vous dans les prochains jours pour une partie 3 sur ce sujet, pour entrer plus en détails dans l’analyse de l’opinion publique russe.
Ça fait bien du sens pour expliquer ce QI leur arrive et en même temps cela reste surréaliste pour moi d’arriver à l’ère de l’internet de contrôler l’opinion de tout un peuple. 😔
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Effectivement Je me demande avec qui et comment il arrive à contrôler les Russes mais ça fait longtemps, d’après moi, même avant l’internet qu’ils ont pour beaucoup cesser de s’exprimer donc plus facile à contrôler que chez nous.
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