Je me lance enfin dans l’ambitieux projet d’écrire sur les déportations des Estoniens, après des semaines à en parler. C’est un sujet qui me tenait vraiment à cœur mais qui en même temps est dur à traiter parce que c’est très émouvant. C’est aussi un sujet extrêmement complexe, et je ne suis pas une historienne spécialisée dans l’Estonie, donc ça ne sera pas non plus l’analyse la plus complète. Je vais simplement présenter des faits, surtout ceux qui m’ont marquée, pour avoir une histoire dans l’ensemble. J’avais déjà parlé des déportations dans l’article sur la minorité russe, puisqu’elles ont été entre autres une stratégie pour « russifier » l’Estonie (et la Lettonie, et la Lituanie). Je vous suggère de relire cet article pour remettre en contexte! Ça donne une bonne base. Mais depuis que j’ai écrit ça, j’ai été en Estonie, j’ai visité un musée, j’ai entendu des témoignages, je me suis procuré des livres (toutes les raisons sont bonnes pour acheter des livres) et j’ai carrément dansé pour illustrer les déportations. Alors je me sens beaucoup plus impliquée dans cette histoire, et surtout plus à l’aise d’en parler sans simplement donner des chiffres. Les chiffres oui sont impressionnants, les déportations ont touché beaucoup de gens, mais en allant en Estonie, j’avais hâte de découvrir les histoires derrière ces chiffres.
Il y a beaucoup à dire, alors ça va me prendre plusieurs articles pour tout couvrir ce que j’ai en tête. Et comme c’est un sujet très lourd et triste, ça se peut que cette série d’articles soit coupée de temps en temps par un sujet plus léger (comme des louanges sur un fruit ou des photos de blocs, ça fait toujours du bien).
Pour tenter de structurer un peu tout ce qu’il y a à raconter, je vais suivre les présentations du Musée des occupations et de la liberté de Tallinn. C’est un musée absolument fascinant qui expose l’histoire du 20e siècle de l’Estonie. Les déportations y occupent une grande place, puisque c’est une conséquence directe de l’occupation soviétique. Mais d’autres aspects de cette occupation sont aussi abordés, comme les fuites, les confréries secrètes dans les forêts, la vie quotidienne en Union Soviétique, et, du côté de la liberté, l’indépendance de 1991. Il y a même une section de blagues soviétiques! Je vous amène donc dans un voyage d’une dizaine d’articles pour couvrir avec émotions mais un peu d’humour les grands bouleversements de l’histoire soviétique de l’Estonie.

Mais d’abord, parlons un peu du musée, qui sera notre guide. Pour faire les présentations officielles, il s’agit du Okupatsioonide ja vabaduse muuseum Vabamu, qu’on appellera plus familièrement par la suite Vabamu (pour s’y retrouver, ce sera dans le titre de tous les prochains articles qui en parleront). J’ai adoré ce musée, c’était d’ailleurs dans mes coups de cœur de Tallinn. Ce n’est pas très cher, encore moins quand notre face donne automatiquement le rabais étudiant (puisque je n’ai toujours pas été chercher ma carte étudiante à Ottawa…). J’ai passé presque 4h à me promener en lisant toutes les pancartes et en écoutant tout ce qui était possible sur mon audio-guide. Tout me semblait fascinant et je ne voulais rien rater! La seule petite critique que j’aurais est que la voix française de l’audio-guide était vraiment énervante alors j’ai rapidement changé pour l’anglais, et c’est un Britannique suave qui m’a accompagnée dans mes découvertes hihi.
L’objectif du musée est de présenter mais surtout de faire réfléchir sur les circonstances et les conséquences de l’occupation soviétique, du désir et de l’obtention de l’indépendance. Le guide enregistrée nous raconte des anecdotes, puis nous questionne: Et vous, qu’auriez-vous fait dans cette situation? Auriez-vous dénoncé votre famille pour éviter la prison? C’est rhétorique bien sûr, mais ça fait un peu mieux comprendre les situations présentées, et les agissements des gens. Le musée pousse l’interaction un peu plus loin en offrant la possibilité de répondre à des questionnaires et des quizz sur des écrans tactiles (avec bien évidemment du désinfectant à côté).
Mais ce que j’ai surtout aimé de ce musée est que les objets qu’il exposait ont appartenu à des gens qui les ont offerts. Je trouve que c’est absolument génial. Quoi de mieux pour rendre l’histoire vivante, que de montrer par exemple un sac à dos, accompagné de l’histoire de son propriétaire lorsqu’il a été déporté, en sachant qu’il est encore vivant aujourd’hui, ou du moins l’était lors de la création du musée? C’est encore tellement récent! Oui tous les objets dans les musées dans le monde ont appartenu à quelqu’un, mais ce sac à dos, qui a voyagé aller-retour Estonie-Sibérie, a servi d’oreiller à un petit garçon, a transporté ces trésors, avant d’atterrir derrière une vitre parce que le petit garçon devenu grand trouvait que c’était important de partager son histoire, je trouve que c’est la meilleure utilisation d’un musée, la meilleure façon d’être touchée, et la meilleure façon de vivre et comprendre ce qui est arrivé. Tous ces objets avaient quelque chose à raconter, et ça donnait des frissons de savoir que ça ne faisait que quelques années qu’ils avaient trouvé la quiétude du musée. Pour moi, cette façon de présenter l’histoire récente est la plus belle réussite de ce musée.

Je ferai de mon mieux pour rapporter cette histoire de façon aussi vivante!
Je commence en disant que j’ai réservé le livre que tu suggères, Ce qu’ils n’ont pas pu nous prendre, de Ruta Sapetys. Je l’aurai bientôt. J’attends un autre livre, Les fugitives, partir ou mourir en Arabie saoudite! C’est un sujet déchirant aussi tout autant qu’en Afghanistan actuellement.
Je suivrai avec intérêt ta chronique sur les déportations. Je sais que ce n’est pas un sujet facile à traiter, mais tu sauras le faire! Le Musée sera une façon de concrétiser cette triste histoire! La photo de conclusion est significative et belle!
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Super pour le livre! C’est très triste mais ça va donner une perspective lituanienne à l’histoire!
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Cool
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Je lis les articles dans le mauvais ordre.
Je viens le lire celui-ci et je comprends mieux ou tu as appris tout ce que tu décrits plus loin. Quelle belle introduction à ce sujet si délicat.
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Ah oui quand même il faut citer ses sources!!
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Étant donné mon retard je dois relire ce texte avant de laisser un commentaire.
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Effectivement pas facile de connaître et de partager cette période si triste et surtout tellement traumatisante pour ces familles qui ont souvent perdu l’essentiel physiquement et psychologiquement et même certain tout perdu.
La danse est bien la preuve que cette période est encore bien présente dans leur vie
J’aime la diversité de tes blogues.
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C’est un héritage familial qui va traverser beaucoup de générations…
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